Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la France a envie de s’amuser. Après les atrocités de ces six sombres années, elle se pose aussi des questions existentialistes. C’est ainsi que le quartier de Saint-Germain-des-Prés, rive gauche, à Paris, est devenu le haut lieu des intellectuels qui, à la fois, réfléchissent au monde qui les entoure et ont une furieuse envie de danser et de jouer de la musique. Et pour se retrouver, faire la fête et sortir de ses logements exigus, la meilleure solution, ce sont les caves de Saint-Germain-des-Prés. Parmi les adresses les plus célèbres, on peut citer Le Caveau des Lorientais, créé en 1946, ou encore Le Tabou, inauguré en 1947.
Et le Prince de Saint-Germain-des-Prés, qui joue religieusement de la trompette dans les caves, n’est autre que Boris Vian, dont la légende se confondra avec celle du quartier (il s’éteindra à seulement 39 ans, en 1959). Dans son ouvrage le plus célèbre, L’Écume des Jours, il dresse d’ailleurs le portrait de ses amis intellectuels, avec qui il passe ses soirées dans les caveaux humides et bouillonnants de Saint-Germain : Jean-Paul Sartre, qui devient alors Jean-Sol Partre, et Simone de Beauvoir, qui prend le nom, dans le roman, de la Duchesse de Bovouard. Vian compte aussi, dans son cercle d’amis proches, le trompettiste Louis Armstrong ou encore le romancier Raymond Queneau.
Toujours est-il que ces caveaux ne font pas l’unanimité chez les voisins, gênés par le bruit ! Ces derniers font ramener l’heure de fermeture du Tabou à minuit. L’établissement, qui accueille effeuilleuses et élections de filles dénudées, est contraint de fermer ses portes au milieu des années 50 et redevient un bistro ordinaire.
Si, aujourd’hui, les caves de Saint-Germain-des-Prés ont disparu, les cafés avec pignon sur rue, eux, restent toujours aussi incontournables. Les deux adresses les plus célèbres, qui ont accueilli Sartre et ses amis, sont sans aucun doute Le Café de Flore et Les Deux Magots, dans lesquels se pressent les touristes pour prendre un café crème. Il y fleure toujours bon le parfum des années 50.